Quand on s’est penchés sur le marché des titres-restaurant, on ne s’attendait pas à ça. On pensait trouver un dispositif un peu poussiéreux, à moderniser. On a découvert un système verrouillé et opaque, proche d’un cartel, où chacun défend ses intérêts au mépris de l’intérêt général.
Un marché de 10 milliards d’euros contrôlé à 99 % par quatre acteurs historiques où tout est fait pour que rien ne bouge : rétro-commissions pour les entreprises clientes, opacité tarifaire pour les commerçants, double facturation masquée. Les restaurateurs reversent 4,5 % de leur chiffre d’affaires en titres-restaurant en commissions.
Ce modèle tient uniquement parce que les émetteurs historiques récupèrent leur marge côté commerçants après avoir offert des conditions imbattables côté entreprises. Les clients sont contents, les restaurateurs paient.
Avec quatre autres émetteurs, nous nous sommes unis et nous avons lancé un collectif : Le CoReCT (Collectif pour le Rééquilibrage des Commissions Titre-restaurant). Nous proposons une alternative plus juste, plus simple, plus transparente avec un modèle reposant sur les standards bancaires (interchange) — Visa, Mastercard, CB — et sans prélever de commission sur les commerçants. Ce n’est pas une révolution technologique. C’est juste un retour au bon sens.
Mais ce modèle, aujourd’hui, est freiné par un terrain de jeu inégal. Quand les émetteurs pratiquent des prix nuls voire négatifs auprès des entreprises clientes, comment espérer une concurrence loyale ?
Nous allons donc militer pour imposer un plafond au montant des commissions perçues auprès des restaurateurs.
Le gouvernement prépare une réforme. Elle ne doit pas se contenter de dématérialiser le support. Elle doit s’attaquer à ce qui coince vraiment : le modèle économique, et les pratiques qui l’entretiennent.
Le titre-restaurant est un outil social formidable. Mais tant qu’il enrichira quelques-uns au détriment de tous les autres, il ne remplira plus sa mission. Le système bancaire ouvert est prêt. Il ne manque qu’une décision politique pour remettre tout le monde à égalité.